Rencontre avec Dorothée Blanpain, triple championne d'Europe et du Monde de rock acrobatique

18 mars 2025 - Communiqué

De la passion à la transmission : le parcours inspirant d’une championne de rock acrobatique

 

Pouvez-vous présenter votre parcours sportif ?

 

J’ai découvert la danse tout à fait par hasard à l’âge de 11 ans, en suivant ma grande sœur qui prenait des cours. À l’époque, je n’étais pas particulièrement sportive.
Le déclic est survenu en regardant un couple de danseurs de Grenoble présenter du rock acrobatique dans l’émission télévisée Les habits du dimanche, animée par Léon Zitrone — un souvenir qui parlera peut-être aux plus anciens — c’était aux alentours de 1986.

 

Fascinée par cette discipline, j’ai d’abord pratiqué la danse en loisir pendant environ un an avant de me lancer pleinement dans le rock acrobatique. Sans professeur, simplement avec mon partenaire et des amis, nous apprenions presque comme un jeu.

 

Tout s’est ensuite enchaîné très vite : nous nous entraînions quotidiennement, déplaçant les meubles d’une pièce chez mes parents pour pouvoir reproduire les figures vues sur des vidéos.

En dehors du rock acrobatique, je n’avais pratiqué aucun autre sport, à l’exception de quelques parties de tennis en loisir.


Comment vous entraîniez-vous ?

 

Après les entraînements ludiques dans la pièce de la maison, la pratique est rapidement devenue plus intensive. Nous nous entraînions quotidiennement dans un gymnase, deux fois par jour : entre midi et 14 h, puis au moins 3 heures chaque soir après l’école. Nous étions accompagnés d’un professeur de gymnastique, d’amis, ou parfois de ma maman qui assurait la parade pour les acrobaties.

 

Les week-ends étaient consacrés à des entraînements à Villeurbanne avec Daniel Simeone (figure emblématique du Rock acrobatique, entraineur et juge en compétitions) 
Au départ, nous n’avions ni harnais ni trampoline — seulement des tapis. C’est dans ces conditions que j’ai tenté mon premier plongeon vrillé (figure acrobatique où la danseuse est projetée par son danseur en l'air et effectue une vrille sur elle-même avant la réception), presque par jeu, portée par l’envie d’explorer toujours plus loin.

 

Parfois, nous allions au gymnase en footing, enchaînant ensuite renforcement musculaire et stretching en début et fin de séance. La technique du jeu de jambes était incontournable, avec des répétitions complètes des enchaînements à chaque entraînement.

 

Le travail au harnais est venu bien plus tard, lorsque nous avons rencontré Konrad et Monica Klein (champions du monde), puis Diego Chiodoni (également champion du monde), qui nous a initiés au trampoline. Cette nouvelle approche a ajouté un entraînement supplémentaire pour perfectionner les doubles saltos lachées, surtout après l’acquisition de notre propre trampoline.

 

 

Pourquoi avez-vous arrêté votre carrière sportive ?

 

Avec mon danseur, nous avons commencé très jeunes le sport de haut niveau, en nous entraînant 5 à 6 heures par jour. Ce rythme intense ne laissait que peu de place pour la vie personnelle : les amis, la famille... D’autant plus pour moi qui devais jongler entre le lycée, puis la fac, les devoirs et les entraînements, tandis que mon partenaire avait arrêté l’école pour se consacrer pleinement à la danse.

 

Ma vie d’adolescente était entièrement rythmée par les entraînements, les compétitions et l’enseignement de la discipline à d’autres jeunes. En effet, la municipalité ne nous mettait un gymnase à disposition qu’à condition de transmettre notre savoir à un public.

 

Après notre troisième titre mondial, c’est mon danseur qui a pris la décision de s’arrêter. J’ai dû accepter cette décision et me réinventer, en orientant ma vie vers une carrière professionnelle.
À l’époque, la discipline était encore très peu connue, et la fédération n’apportait pas le soutien que les danseurs peuvent recevoir aujourd’hui. Il était devenu difficile de concilier travail et entraînements à un tel niveau d’exigence.

 

Il a donc fallu, à contrecœur, tourner la page et ouvrir un nouveau chapitre de ma vie…

 

 

 

Qu’avez-vous fait après votre carrière sportive ?

 

Après le bac, j’ai poursuivi mes études avec une licence de lettres, en me destinant à devenir professeur des écoles. Mes parents m’avaient toujours inculqué cette idée : "Pense à l’avenir. Que feras-tu après ? Notre corps n’est pas une machine, et une blessure peut arriver à tout moment..." Merci papa et maman !

 

Animée par l’envie de mieux comprendre l’impact de l’alimentation sur la performance, j’ai ensuite suivi un cursus en diététique — avec peut-être un brin de regret de ne pas avoir eu cette aide en tant que sportive.
Parallèlement, j’ai enrichi mes compétences avec divers diplômes : moniteur de danse country, maîtrise AMDF (Rock/Boogie), tronc commun du brevet d’État, CQP Sport pour tous, instructeur Zumba, instructeur FITSTEPS, ainsi que plusieurs autres formations diplômantes.

 

L’association qui avait été créée pour me soutenir et me permettre d’accéder à un gymnase grandissait avec la notoriété. 

 

Puis, après le temps des compétitions est venu celui du loisir — et celui de devenir maman.
J’ai continué à transmettre ma passion en diversifiant mes activités : j’ai élargi mon public et travaillé dans le milieu scolaire grâce à un agrément, partageant ainsi mon amour de la danse et du mouvement avec les plus jeunes.

 

 

Que faites-vous maintenant ?

 

Je travaille dans l’école de danse que mes parents ont créée pour moi il y a 30 ans, ainsi que dans l’association Les p’tits loups. J’interviens également dans les écoles, les maisons de retraite ou lors d’événements, en fonction des demandes.

 

Aujourd’hui, je consacre une grande partie de mon temps à travailler avec les enfants et à animer des manifestations de rue dans ma ville. Je me suis orientée vers la danse de loisir pour tous les publics, une passion que j’ai la chance de partager avec ma fille, désormais âgée de 19 ans, et toujours aux côtés de mes parents.

 

 

Est-ce que vous pensez que votre carrière sportive continue de vous aider au quotidien ?

 

Ma carrière sportive et la danse m’ont apporté énormément dans de nombreux domaines.

 

Sur le plan émotionnel, la connexion entre la musique et le mouvement reste pour moi une source inépuisable de plaisir et d’évasion. Cette passion partagée est le meilleur remède contre les baisses de moral.

 

Le côté plus sportif m’a appris à gérer le stress, une compétence précieuse qui m’a permis d’affronter des épreuves très difficiles dans ma vie. Lorsque j’ai été atteinte d’un cancer, j’ai subi une lourde opération suivie d’un traitement intense. Pourtant, le mental forgé par le sport de haut niveau m’a aidée à traverser cette épreuve avec résilience. J’ai abordé la maladie comme une nouvelle compétition à gagner, repoussant sans cesse mes limites, avec pour objectif de retrouver la force de danser, comme si rien ne s’était jamais passé.

 

Ma notoriété m’accompagne encore aujourd’hui. Même si beaucoup ignorent mes titres, le prénom Dorothée reste connu à l’échelle de ma ville. Pour certains, qui ont grandi en suivant mon parcours dans la presse locale, il reste un souvenir marquant. Ces anciens spectateurs, devenus parents ou grands-parents, me confient aujourd’hui leurs enfants, renforçant ce lien intergénérationnel autour de la danse.

 

Ces titres, associés aux diplômes et formations que j’ai obtenus, sont aussi un gage de qualité et de sérieux. Mais au-delà des reconnaissances officielles, ma carrière sportive m’a surtout transmis une force intérieure, une volonté constante d’aller de l’avant, une rigueur dans le travail, une gestion du stress et une hygiène de vie.

Et par-dessus tout, elle m’a appris que la véritable richesse réside dans la passion et la transmission de celle-ci.


Avez-vous un conseil pour les futures générations d’athlètes ?

  • Ne perdez jamais de vue la notion de plaisir : c’est elle qui nourrit la passion et vous porte dans les moments difficiles.
  • Allez au bout de vos rêves, vivez votre passion pleinement, mais sans jamais négliger votre sécurité. Évitez les risques inutiles et prenez soin de votre corps — c’est votre meilleur allié.
  • Gardez en tête que la vie réserve des surprises : sans être pessimiste, pensez aussi à votre avenir professionnel pour construire un équilibre durable.
  • Faites toujours de votre mieux pour laisser une belle image de vous, écoutez les conseils, restez humble, et n’oubliez jamais que la progression passe par l’apprentissage constant.
  • Entourez-vous de personnes compétentes, en qui vous avez confiance, et sachez leur rendre tout ce qu’elles vous apportent.

 

Et surtout… dansez aujourd’hui, demain, toujours !

 


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